︎ LES RAILS DE LA MÉMOIRE ︎ LYON
Projet Lauréat
Mémorial de la Shoah
Place Carnot, Lyon
Association pour l’édification d’un Mémorial de la Shoah
Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation
Equipe :
T/E/S/S ingénieur - VPEAS Economie - atelier NDF - Les éclairagistes associés -
︎ LES RAILS DE LA MÉMOIRE ︎ LYON
Projet Lauréat
Mémorial de la Shoah
Place Carnot, Lyon
Association pour l’édification d’un Mémorial de la Shoah
Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation
Equipe : T/E/S/S ingénieur - VPEAS Economie - atelier NDF - Les éclairagistes associés -
A quelques mètres de la gare de Lyon-Perrache d’où sont partis les trains transportant 6100 juifs de la région Auvergne-Rhône-Alpes, à destination de Drancy et des camps de la mort, l’évocation des convois de déportés voués à la solution finale… Un Mémorial fait de 1.173 mètres de rails symbolisant les 1.173 kilomètres de voies ferrées séparant Lyon d’Auschwitz-Birkenau.
La symbolique du lieu sur lequel le projet prend place et la symbolique du rail en tant qu’incarnation universelle de la Shoah nous
a mis face à une évidence : utiliser exclusivement les éléments du chemin de fer comme matériaux de construction du Mémorial. Ils sont au nombre de
trois : le rail métallique, la traverse de bois et le ballast.
Témoignages physiques de l’histoire, les éléments du chemin de fer évoquent un sentiment de réalité et une connexion tangible avec les événements
passés. Le visiteur est ainsi directement confronté aux traces matérielles et palpables de l’Holocauste. Les voies ferrées sont perçues comme des lieux de séparation et de déchirement, où les familles ont été arrachées les unesdes autres et où les destins ont été scellés. Utiliser les éléments du chemin de fer pour un Mémorial, c’est créer un véritable lieu de commémoration où
le recueillement est directement lié aux victimes.
LES VOIES FERRÉES
Il est impossible de dissocier la Shoah de ses sentiers funestes. Complice silencieux de cette mécanique de la mort, le réseau ferroviaire européen est l’une des fondations idéologiques et logistiques les plus évidentes de la Shoah, car il représente la deuxième étape de l’expérience concentrationnaire, celle qui succède à l’arrestation et précède la mort. Le réseau ferroviaire a fourni à l’Allemagne nazie les moyens de mettre en oeuvre de manière industrielle le transport et l’extermination des Juifs, au-delà même de ses frontières. La mémoire collective et les clichés historiques témoignent de leur omniprésence, Il constitue le fil rouge de cet événement macabre.
SYMBOLE UNIVERSEL
D’un point de vue mémoriel, le chemin de
fer n’est pas rattaché à un lieu historique
spécifique à proprement parler, mais il fait référence à d’innombrables non-lieux
pourtant porteurs d’évènements tragiques,ceux dont la mémoire a été oubliée. Il n’est pas
non plus rattaché à un événement particulier,
mais il raconte toutes les histoires, aussi singulières soient- elles. Les rails, empreintes
immatérielles et témoignages silencieux, sont
sans doute les derniers vestiges et stigmates des paysages par lesquels ont transité des
millions de Juifs. Ils ont le devoir d’entretenir
cette mémoire.
Ainsi, le projet repose sur une idée simple:
celle d’illustrer la mise en demeure, la
déconstruction et le démantèlement symbolique d’une de ces lignes de chemin
de fer historiques afin de la transformer en oeuvre dont la signification paraît évidente:
celle d’un lieu qui honore la mémoire de ceux
qui ont été forcés de voyager vers leur mort.
La forme générale du mémorial résulte d’un
empilement de rails dont le linéaire total est de 1173 mètres, soit le 1/1000 ème de la
distance qui sépare Lyon à Auschwitz à vol
d’oiseau, c’est à dire 1173 km.
LA RÉSILIENCE ET L’ESPOIR
La symbolique ne s’arrête pas là : elle incarne l’espoir. La réutilisation des matériaux du chemin de fer symbolise avec force la résilience et la capacité de l’humanité à se reconstruire après des périodes d’atrocité. En étant entièrement façonné à partir de matériaux de réemploi, le Mémorial se présente comme un acte de résistance symbolique percutant : en insufflant une nouvelle signification à ces matériaux associés à la déportation, nous affirmons la volonté de se
souvenir, de se reconstruire et de résister à l’oubli.
La force de l’oeuvre réside également dans le contraste créé entre la matière brute du rail et la lumière qui traverse l’oeuvre de tous côtés. Cette combinaison agit comme un véritable message d’espoir et de puissance qui ajoute
une dimension émotionnelle supplémentaire à l’oeuvre. L’accumulation saisissante de ces rails en quinconce reproduisent autant de « lignes de chemin de fer » qu’ils racontent de trajets et d’histoires singulières. Chaque ligne porte en elle une histoire, un souvenir distinct. L’espoir émane ainsi aussi de ce réseau de rails : en suivant les lignes avec les yeux, l’oeil est
finalement guidé vers la lumière.
ASSEMBLAGE DES RAILS
Le Mémorial se présente sous la forme d’un empilement et d’une accumulation de rails disposés en quinconce. (fi g 1)
L’accumulation représente l’ampleur de la tragédie. Elle vise avant tout à rendre un double hommage : à la fois individuel lorsqu’un rail est isolé par le regard, et collectif lorsque l’oeuvre est contemplée dans son ensemble. L’accumulation de rails dessine une silhouette rectangulaire qui résonne avec la silhouette des convois de déportation, éveillant les mémoires à un
chapitre solennel de l’histoire. Le nombre, le rythme et l’espacement des rails sont autant de facteurs qu’il existe de possibilités : en découle un projet extrêmement flexible et adaptable. Si certains paramètres venaient à évoluer par la suite, le concept du projet n’en serait en aucun cas altéré.
LE MESSAGE PORTÉ
Une des intentions principales du projet a été de ne pas se contenter d’apposer un simple écriteau sur le Mémorial. Le message doit s’incarner pleinement dans l’architecture du Mémorial. Pour cela, nous substituons des rails par des lettres « extrudées» conservant les mêmes dimensions et la même matérialité que le rail. L’écriteau se fond dans l’architecture et l’architecture se fond dans l’écriteau : ainsi, le message et le mémorial s’unissent pour créer une oeuvre
dont le message est extrêmement lisible.
LE BALLAST : LE SEUIL
Le seuil dans un Mémorial revêt une importance symbolique et émotionnelle majeure. Il marque le passage d’un espace extérieur ordinaire à un espace solennel et commémoratif dédié à la mémoire collective. Franchir ou simplement identifi er ce seuil invite à l’introspection, au respect et au recueillement. Afi n de démarquer le Mémorial de l’espace public, nous créons une large rigole dans laquelle nous déversons un lit de cailloux : le ballast des chemins de fer.
Ce ballast est déversé dans la rigole avec une légère inclinaison pour donner la sensation que cette sculpture de rails, lourdes et solide, flotte sur un lit de cailloux. Elle donnera une sensation de légereté à l’oeuvre. Le ballast est un matériau peu coûteux, non polluant et surtout perméable, il est donc idéal pour l’aménagement d’un espace public. La pluie, les luminaires et les élements techniques du Mémorial se dissimuleront à l’intérieur.
LE MOUVEMENT COMME EXPÉRIENCE DU MEMORIAL
La cinétique revêt une importance capitale lorsqu’il s’agit de créer une narration visuelle. Par le mouvement du corps, la cinétique stimule la curiosité et incite le visiteur à explorer davantage, l’incitant à se déplacer et à interagir activement avec le mémorial. Cette approche interactive et immersive rend l’expérience mémorable et suscite une réfl exion plus profonde, attentive aux signifi cations portéespar l’oeuvre. La transparence est un élément clé qui confère au mémorial une toile de
fond, l’intégrant dans un contexte précis et permettant aux visiteurs de saisir l’espace dans son ensemble.
La force du Mémorial réside également dans le contraste créé entre la matière brute du rail et la lumière qui traverse l’oeuvre de tout côté. Cette combinaison agit comme un véritable message d’espoir et de puissance. Cette interaction permet aux visiteurs de percevoir les changements environnementaux, tels que les variations de lumière ou de couleur qui ajoutent une dimension émotionnelle supplémentaire à leur expérience.
UN MEMORIAL A 4 FACADES
Etant donné le caractère très passant de la place Carnot et de la position centrale du mémorial, l’oeuvre se doit d’interpeller des quatre coins de la place. De ce fait, le projet comprend quatre façades: les deux petites latérales font office de repère urbain lointain en continuité des rues General Plessier et Duhamel qui débouchent sur la place Carnot. Les deux autres façades sont les façades principales: celle tournée vers la place portant le message a pour objectif d’accrocher le regard des piétons qui y passent. La seconde, orientée vers le parc, incarne le silence et le recueillement. L’oeuvre a été positionnée de sorte à créer une composition spatiale en harmonie avec la statue de la Republique. En effet, lorsque l’on se trouve dans la partie orientée vers le parc, on a un alignement et une vision directe sur la statue de la Republique qui regarde et semble veiller sur le mémorial de la Shoah.